
Stewart Island, la dernière frontière
Stewart Island est la troisième île de Nouvelle-Zélande, souvent oubliée des parcours touristiques et encore aux trois quarts vierge. Sébastien, le fondateur de l’agence de voyages locale Frogs vous raconte son escapade de 4 jours sur ce territoire à découvrir de Nouvelle-Zélande.
Un vol d’approche étonnant
A Invercargill, le ton est donné. On va faire un bond dans le temps. Le jeune homme qui enregistre nos bagages fera aussi l’accueil à la seule porte de l’aéroport (Gate 1), puis lorsque les 6 passagers seront sanglés, sautera sur son siège pour piloter. C’est calé sur un siège à ressort recouvert d’une peau de mouton d’un petit avion qu’on termine le dernier tronçon pour rejoindre l’île. Ce Britten-Norman Islander de fabrication anglaise en a affronté des quarantièmes rugissants depuis les années 60. Ainsi, plus on s’éloigne d’Auckland et plus les avions sont devenus petits. On a le sourire jusqu’aux oreilles lorsqu’on décolle et que l’on survole le détroit de Foveaux qui nous mènera à Oban sur Stewart Island.

On quitte alors les plates plaines agricoles d’Invercargill pour ce petit joyau montagneux qui n’est pas sans rappeler le Parc National Abel Tasman, l’île de Great Barrier ou la péninsule de Coromandel. On peut également rejoindre l’île par des ferries réguliers depuis Bluff.
Des monts recouverts de forêt bordent de magnifiques baies au sable doré et à l’eau turquoise. L’île de Stewart Island, très étendue, est en majorité (85%) protégée par le statut de Parc National (Rakiura National Park) depuis des lustres et son isolement et la rudesse de son climat a protégé une immense partie de la hache des premiers colons européens. Et il est vrai qu’en son cœur, on se croirait au Gondwana, la terre primitive d’avant la séparation des continents. Ici pas d’immenses kauri comme dans le nord du pays, mais leurs grands cousins, rimu et totara, qui émergent de la canopée.

400 habitants, 280 kilomètres de sentiers !
Installés dans un crib, un cottage de vacances bien typique avec une belle vue sur Halfmoon Bay, nous commençons nos recherches. Direction le centre DOC du petit et unique village de 400 habitants de l’île, Oban. L’équipe de rangers, très sympa, nous donne toute l’info nécessaire pour les balades que nous projetons. Ils nous indiquent même où voir des kiwis à la tombée de la nuit et nous offrent un film infrarouge à installer sur notre frontale. Et ce sera bien utile ! Après un petit tour de l’expo permanente du centre, nous voilà parti pour 3 jours de balades et découvertes.

Les randonnées de Stewart Island
La randonnée phare de l’île, Rakiura Track, reconnue comme une des 9 « Great Walks » du pays, propose de s’enfoncer dans la partie nord de l’île en une boucle de 32 km (sur les 280 km de sentiers qui y existent). Plusieurs refuges permettent aux randonneurs ayant réservés de se loger chaque soir. N’étant pas équipé pour randonner plusieurs jours, nous ferons des morceaux de ce sentier ainsi que de plusieurs des autres balades qui foisonnent depuis le village. Tous les sentiers sont particulièrement bien équipés et entretenus et permettent des découvertes pour tous niveaux. Il peut être judicieux de louer un scooter ou une voiture au village, ou de faire du stop pour rejoindre certains sentiers et s’éviter les quelques kilomètres de route (surtout pour le début du Rakiura Track vers Maori Bay). Procurez-vous le petit guide bien fait « Stewart Island / Rakiura Short Walks » pour découvrir plages perdues, promontoires, sentiers côtiers et panoramas.

Si la forêt native est belle, on s’étonne toujours de son homogénéité du nord au sud. On retrouve ici les mêmes espèces qu’on retrouvera à plus de 1200 kilomètres au nord. C’est surtout pour les oiseaux qu’on fait le voyage. En effet, l’île et ses îlots comptent une magnifique concentration de tout ce qui vole en Nouvelle-Zélande. Au soir, les kaka (perroquets natifs) viennent frapper au carreau pour un morceau de pomme, les mélodieux tui sont partout et enfin ce sera un des sites phares pour voir des kiwis dans leur milieu naturel. Et oui, vous pouvez compter sur une population d’environ 20 000 de ces icônes vivantes !
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Suivant les conseils du ranger, il suffit de se balader aux abords du terrain de rugby à la nuit tombée pour découvrir ces curieux oiseaux qui viennent s’aventurer hors du bush qui borde le site. Ceux qui camperont au cœur du parc auront encore plus de chance d’en voir, loin du village. Et parfois même de jour, car l’absence de prédateur semble les rendre moins timides !

Ulva Island, l’île aux oiseaux
Un séjour à Stewart Island n’est pas complet sans une virée sur Ulva Island, la petite île qui dort au milieu de la grande baie fermée de Patterson Inlet.

A l’époque où 1000 bûcherons et leurs familles occupaient la baie, à la fin du 19ème siècle, l’île hébergeait le bureau de poste, le postier et sa famille. Sa position centrale permettait au postier d’indiquer à cette foule de pionniers que le courrier était arrivé en hissant un drapeau sur un promontoire de l’île. Ce postier, Charles Traill, admire tant la beauté naturelle de son île qu’il sera un des premiers à en demander la protection par le gouvernement.
Depuis, ce sont les rangers de l’île qui font une chasse dans relâche aux rats et autres belettes qui chercheraient à y atterrir. Sans prédateurs, suite à une politique active de repeuplement d’espèces en dangers, on s’émerveille d’y voir Saddleback, weka, tui, bellbird, robin, kaka peu peureux et sur certaines parties des sentiers en relatif grand nombre par rapport au continent. Il faut parfois s’arrêter quelques minutes pour laisser tout ce petit monde s’animer dans la forêt autour de soi. Des cris poussés de chaque côté du sentier nous arrêtèrent nets en pleine forêt.

Trois heures suffisent pour parcourir les quelques sentiers balisés de l’île qui ne permettent l’accès qu’au tiers ouest de l’île (le guide « Ulva Island » à $2 est très utile, à acheter au DOC). Des bateaux taxis réguliers ou à la demande sont disponibles depuis le village ou Golden Bay (10 min à pied). Nous n’avions pas pris de guides, mais nous vous le recommandons si votre connaissance des oiseaux natifs est limitée. Il faudra compter environ $145 par personne ($70 enfant) guidé ou $25 pour un ferry seul à horaires réguliers en été. On peut même combiner avec une petite croisière et de la pêche au blue cod, la morue native qui abonde par ici.

Oban, hameau du bout du monde
Le minuscule port vit de la pêche au crayfish (langouste locale) et au cod, la morue. Mais en été, vacanciers locaux et visiteurs étrangers apportent une grande animation et remplissent centre d’information, pub et les quelques restaurants du lieu. Il y a même une crêperie franco-kiwie pour les nostalgiques ! Nous avons beaucoup aimé la faune qui se retrouve au pub de l’île, pêcheurs locaux (en bottes blanches), rangers volontaires du DOC (en bottes noires) et randonneurs de passage (en grosses tatanes de rando). On y mange une cuisine assez correcte tout en admirant soit le sport à la télé, soit le ballet des mouettes à travers les grandes baies vitrées. Enfin, ceux qui sont plus exigeants pourront aller déjeuner ou dîner au Church Hill Restaurant & Oyster Bar, sur la colline. On y déguste une cuisine raffinée dans un cottage centenaire sous les palabres du proprio, Chris, qui a quitté sa sauvage West Coast pour rejoindre un coin plus perdu encore !

Fin de l’aventure et retour par les airs. Une petite énigme ; dans la mythologie maorie, l’île représente l’ancre du mythique Maui qui aurait pêché l’île du Nord depuis son radeau géant, l’île du Sud. Et un morceau de chaîne est encore visible sur l’île. On vous laisse la trouver…
Voyagez avec l’agence locale Frogs
Sébastien Michel
Fondateur de l’agence locale Frogs
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Super article